SOPECO : une entreprise à bout de souffle entre dettes, crise sociale et dérive managériale
- Excelsior INFO
- il y a 5 jours
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La Société des postes et de l’épargne du Congo (SOPECO) traverse l’une des périodes les plus sombres de son histoire. Entre une gouvernance contestée, une situation financière au bord du gouffre et une défiance grandissante du personnel, l’entreprise publique semble s’enliser dans une crise sans issue.
Créée pour garantir un service postal et financier accessible à tous, la SOPECO s’éloigne peu à peu de sa mission première. Derrière la façade d’une entreprise d’État censée servir l’intérêt public, se cache désormais un modèle économique en ruine : plus de cinquante mois d’arriérés de salaires, une dette sociale explosive et un climat interne miné par la défiance.
« Ce n’est plus seulement un problème de salaires impayés, c’est une faillite de gouvernance », déplore un agent syndiqué joint par nos soins.
En janvier 2023, un protocole d’accord avait suscité un bref espoir parmi les employés. Celui-ci prévoyait un plan d’apurement progressif des arriérés, une meilleure transparence sur la gestion des revenus du timbre électronique et une réorganisation du personnel. Deux ans plus tard, ces promesses ne sont restées que des mots.
Selon plusieurs témoignages, la direction générale n’aurait respecté aucun des engagements initiaux. Les fonds issus du timbre électronique, censés renforcer la trésorerie, auraient été dilapidés sans que les salariés n’en voient la couleur.
À la crise salariale s’ajoute la dégradation avancée du matériel de travail : véhicules en panne, bâtiments délabrés, mobilier hors d’usage. Dans certaines agences de province, le personnel travaille encore sans climatisation ni matériel informatique adéquat.
Cette précarité opérationnelle entrave les activités postales et accentue la perte de confiance du public, déjà attiré par les services numériques des opérateurs privés.
La gestion interne de la directrice générale est au centre des critiques. Les syndicats dénoncent des affectations partisanes et des reclassements opérés en dehors de toute légalité. Ces pratiques auraient contribué à briser la cohésion au sein du personnel et à accentuer la fracture entre la direction et les agents.
Les syndicats réclament aujourd’hui non seulement la suspension de ces décisions, mais aussi la reprise immédiate du dialogue social, bloqué depuis plusieurs mois.
Pour de nombreux observateurs, le cas de la SOPECO illustre le déclin des entreprises publiques congolaises, souvent étouffées par la mauvaise gouvernance, le clientélisme et le manque de vision stratégique.
Les syndicats demandent désormais un signal fort de l’État : un audit financier indépendant, la restructuration du management et la nomination d’un cadre issu du corps postal à la tête de la Banque postale du Congo, dont la SOPECO détient une part importante.
L’intersyndical n’exclut pas de passer à un sit-in illimité dans les jours à venir, si aucune réponse concrète n’est apportée. Une paralysie des services postaux aurait des répercussions considérables, notamment sur les opérations de transfert et d’épargne des particuliers.
Mais au-delà du bras de fer syndical, c’est la survie même de la SOPECO qui est en jeu. Sans réforme profonde ni volonté politique réelle, l’entreprise risque de s’éteindre lentement entraînant avec elle des centaines de familles dépendantes de ses maigres ressources.
Léna Keïra
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